Depuis le lancement de ChatGPT par OpenAI en novembre 2022, l'écosystème de rédaction académique a subi une transformation radicale. De nouvelles recherches révèlent une dépendance croissante des scientifiques envers des outils d'intelligence artificielle tels que ChatGPT pour la rédaction d'articles de recherche, une tendance particulièrement marquée en 2024.
Des chercheurs de l'université de Tübingen en Allemagne ont mené une analyse approfondie de 14 millions de résumés d'articles de PubMed publiés entre 2010 et 2024. Ils ont constaté avec surprise qu'au moins 10 % des articles de recherche publiés en 2024 ont été rédigés avec l'aide de grands modèles linguistiques (LLM) tels que ChatGPT. Ce pourcentage est même beaucoup plus élevé dans certains domaines et pays spécifiques.
Les résultats de l'étude montrent que l'impact des LLM sur la littérature scientifique est considérable, dépassant même celui de la pandémie de COVID-19 sur la rédaction académique. En analysant les variations de fréquence des mots, les chercheurs ont remarqué une augmentation significative de l'utilisation de certains termes stylistiques spécifiques, tels que "delves", "showcasing" et "underscores", depuis le lancement de ChatGPT, reflétant ainsi le recours croissant des scientifiques à ChatGPT pour peaufiner et modifier leurs textes.
L'étude a également mis en évidence des différences entre les disciplines, les pays et les revues. L'utilisation des LLM est la plus élevée dans des domaines tels que l'informatique et la bio-informatique, atteignant 20 %. Elle est également relativement plus importante dans les pays non anglophones comme la Chine, la Corée du Sud et Taïwan, tandis qu'elle est plus faible dans les pays anglophones comme le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande. De plus, les revues prestigieuses telles que Nature, Science et Cell affichent un taux d'utilisation des LLM plus faible, contrairement à certaines revues en accès libre comme Sensors et Cureus.
Les LLM excellent indéniablement pour améliorer la qualité et la fluidité linguistique des articles, mais ils soulèvent également des inquiétudes. Par exemple, ils peuvent introduire des informations inexactes ou renforcer les biais existants dans les discussions scientifiques. Par conséquent, la question de l'utilisation responsable de ces outils, afin de garantir l'authenticité et l'objectivité de la rédaction académique, est un enjeu majeur qui nécessite une solution urgente.
Le monde académique doit élaborer des politiques et des lignes directrices claires pour réglementer l'utilisation des LLM dans la rédaction académique. Certains éditeurs et organismes de financement ont déjà interdit l'utilisation des LLM dans l'évaluation par les pairs, ou exigé une déclaration explicite de leur utilisation. Avec la généralisation de ces outils, le monde académique devra probablement réexaminer et adapter les politiques existantes afin de garantir la qualité et la fiabilité de la recherche scientifique.
Cette étude nous offre non seulement un aperçu complet de l'impact des LLM sur la rédaction académique, mais elle nous met également en garde. Tout en profitant des avantages de l'IA, nous devons réfléchir à la manière d'utiliser cet outil pour promouvoir, et non entraver, le progrès scientifique.